Marv ur “chieftain”, marv ur pennrener – La mort d’un “chieftain”, la mort d’un leader (bilingue)

 Patrick Moloney ( Padraig  O’ Maoldomnaigh  en irlandais ) est décédé au mois d’octobre dernier, à Dublin,  à l’âge de 83 ans.

 
  Abred e tesk seniñ ar fleüt vihan iwerzhonek anvet an “tinwhistle” hag un tammig diwezatoc’h ar pib-ilin gant ar mestr Leo Rowsome. Donezet-mat eo ar paotr yaouank ha buan e teu da vezañ ur soner dibar. E 1950, e tizh gant Sean O’ Riada (ur soner en deus graet kement a vad evit savetein ar sonerezh iwerzhonek hengounel deus an ankounac’h) hag e kej goude-se gant “O’ Riada Group Ceoltoiri Chualann” e 1960.
     Krouet e vezas ar strollad “The Chieftains” gant Paddy Moloney hag e vignon Sean Potts e 1962 : ur strollad a bado …betek marv e grouer ! Bleiner The Chieftains eo bet Paddy, ur bleinier buhezek. Met ur sonaozour eo bet ivez, ur c’hendercher hag  ur c’hannadour evit ar sonerezh iwerzhonek dre ar bed. Soñjit ‘ta ! Ouzhpenn 40 bladenn a zo bet embannet gant ar strollad ha n’ouzer ket pegement troiadoù a zo bet graet gant The Chieftains er bed a-bezh !
     Ar pib-ilin eo bet ar benveg a oa an tommañ d’e galon: setu aze “un amazing instrument !”. en doa kustum da lavarout. Met seniñ a rae ivez an akordeons diatonek hag ar bodhran, ur benveg en deus lakaet war-wel.
     Ur sonaozour hag un aozer eo bet ivez evel ma ‘zo bet lavaret uhelloc’h. Aozet a zo bet gantañ meur a sonerezhed filmoù. Dedennet e oa ivez gant sonerezhed all hag evel-se  en deus bet tro da seniñ gant Mick Jagger, Sting, McCartney, Stevie Wonder….
     Paddy Moloney a oa tomm dezhañ e galon ouzh Breizh, e-lec’h en doa bet prenet un ti-hañv, e Bubry. Ouzhpenn unnek wech en deus kemeret perzh er Gouelioù Etrekeltiek An Oriant.
     A-du ‘zo an holl evit lavarout e vanko kenañ d’ar bed ar sonerezh keltiek.
     Evel ma lavar’ ( e gouezeleg) Alan Stivell, ur mignon hag ur breur dezhañ abaoe tri-ugent vloaz : “Cailleanas ollmhor don domhon Ceilteach agus do cheol.”  (troidigezh :Ur c’holl meur eo  evit ar Bed kektiek hag ar sonerezh)
                                          
     Aet eo bremañ da “Tir na nOg”, paradoz ar Gelted. Eno en em gavo sur a-walc’h o seniñ gant ar sonerien pib-ilin meur a zo aet d’an Anaon, siwazh, bloavezhioù zo, evel Willy Clancie, Leo Rowsome, Seamus Ennis ha Liam O’ Flynn. 

  Il apprend très tôt à jouer de la petite flûte irlandaise qu’on appelle le “tinwhistle” et, un peu plus tard, le uilleann pipe (1), avec le maître Leo Rowsome. Le jeune homme est très doué et  devient vite un merveilleux sonneur. En 1950, il rencontre  Sean  O’ Riada (un musicien qui fit tant pour sauver le musique  traditionnelle irlandaise de l’oubli) et rejoint “O’ Riada Group Ceoltoiri Chualann” (2) en 1960.
     En 1962, Paddy Moloney crée, avec Sean Potts, le groupe “The Chieftains” (3): un groupe qui durera…..jusqu’au décès de son fondateur ! Paddy en a été le leader, un leader plein d’enthousiasme. Mais il a  aussi été un compositeur, un producteur et un grand ambassadeur de la musique irlandaise à travers le monde. Pensez donc ! Plus de 40 albums ont été produits par le groupe et on ne compte plus le nombre de tournées effectuées par les Chieftains dans le monde entier.
     Le uilleann pipe a été son instrument de prédilection : ” it’s an amazing instrument !” (“c’est un instrument fantastique”), avait-il coutume de dire. Mais il jouait également de l’accordéon diatonique et du bodhran (4), un instrument qu’il a remis à l’honneur. C’était, comme il a été souligné, un compositeur. Il a ainsi composé de nombreuses musiques de film. Il portait aussi beaucoup d’intérêt aux autres formes musicales et il a eu l’occasion de jouer par exemple avec Mick Jagger, Sting, McCartney ou Stevie Wonder.   
     Paddy Moloney
était également très attaché à la Bretagne, où il avait acheté une maison de vacances, à Bubry. Il a participé plus de onze fois au Festival Interceltique de Lorient.
     Tous s’accordent à dire qu’il manquera énormément à la musique celtique.
     Ainsi que le dit (en gaélique) Alan Stivell, son ami et son frère depuis soixante ans : “Cailleanas ollmhor don domhon Ceilteach agus do cheol.” (trad : c’est une perte irréparable pour le monde celtique et la musique.)  
   Il est maintenant dans le “Tir ‘na nOg”, le paradis des Celtes. Là, il va se retrouver, c’est sûr, en compagnie des nombreux grands sonneurs de uilleann pipe qui nous ont quittés, voici plusieurs années comme Willie Clancy, Leo Rowsome, Seamus Ennis et Liam O’ Flynn. 

YK miz Kerzu 2021 (Décembre 2021)

sources : internet… et souvenirs

(1) L’ uilleann-pipe      Le terme “uilleann” est le génitif  de “uille” qui en irlandais signifie “coude”: prononcer “iline” (cela ressemble à  “an ilin”: le coude, en breton). Pourquoi le coude ? Parce qu’on utilise le coude et le bras pour appuyer d’un côté  sur la poche de cette cornemuse si particulière et pour actionner de l’autre côté le soufflet  qui permet d’alimenter la poche en air. Vous suivez ? D’où le nom d’uilleann pipe donné à notre cornemuse. Cette appellation n’est usitée que depuis le 19ème siècle. On parlait auparavant, au 18ème siècle, d’union pipe. La facture de l’instrument a d’ailleurs, depuis lors, sensiblement évolué.

On pense que cette cornemuse est issue de l’évolution d’une cornemuse qu’on appelait “pastoral pipe” et qui se jouait debout (comme le bag-pipe d’Ecosse d’aujourd’hui). Cet instrument aurait-il été interdit en Irlande par l’Angleterre, étant donné que c’était un instrument d’extérieur permettant d’affirmer l’identité irlandaise ? Toujours est-il qu’apparut au 18ème siècle un instrument plus discret, moins sonore, que l’on pouvait jouer à l’intérieur, sans attirer l’attention de l’occupant anglais, avec l’utilisation du soufflet au lieu de la bouche, à l’instar de la musette de cour…française. Réalité historique ou simple spéculation ? Nul ne le saura jamais…

C’est en tous les cas un instrument extraordinaire, la plus complexe des cornemuses, dont le chanter (le chalumeau) est capable de couvrir deux octaves et qui possède trois bourdons  accordés suivant trois octaves différentes (half-set). Il  peut également posséder trois régulateurs: ce sont des bourdons supplémentaires munis de clefs qui permettent d’enrichir l’accompagnement: on parle alors de full-set. Bref, un vraie usine à gaz !

L’instrument  faillit disparaître dans les années 50 – 60. Il doit sa renaissance au mouvement, à cette période, de “revival” de la musique traditionnelle irlandaise et à l’action, notamment du grand piper Seamus Ennis qui influença toute une nouvelle génération de sonneurs, dont, entre autres, Liam O’ Flynn, Paddy Moloney et Paddy Keenan. On retrouvera alors cet instrument bien présent dans des groupes comme Planxty, The Chieftains, The Bothy Band, etc.

Les uilleann pipes étaient initialement en tonalité de  Do, Do dièse ou Si (flat-set), au son très mélodieux; le jeu en soliste étant privilégié. Au fil des ans, la tonalité a grimpé. La plupart des uilleann pipes sont aujourd’hui en Ré (concert-pitch), à la sonorité plus puissante, permettant de s’intégrer plus facilement dans un groupe avec de nombreux autres  instruments.

Quelques noms de joueurs d’uilleann pipe en France (liste non exhaustive): Loic Bléjean, Kevin Camus, Konogan an Habask, Ronan Le Bars, Emmanuel Lemare, Patrick Molard, Yoann an Nedeleg. Loic Padellec. Marc Pollier, Brendan Ring, Calum Stewart, etc. sans  oublier Jean-Pierre Bodilis ( fondateur, avec son épouse Marie-Claude, de la Kevrenn de La Rochelle ). Il faut mentionner aussi le nom de Daniel Hervé qui a été le premier à avoir fait connaître l’uilleann-pipe en France dans les années 1970, tout d’abord auprès des Bretons de Paris. Il fut le  premier professeur ayant formé nombre d’élèves à l’apprentissage de cet instrument.

A l’étranger (essentiellement en Irlande), on peut citer : Joey Abarta, Catherine Ashcroft, Ronan Browne, Peter Browne, Dicky Deagan, Tommy Keane, Paddy Keenan, Mickael McGoldrick, Padraig McGovern, Gay McKeon, Sean McKeon, Chris McMullan, Louise Mulcahy, Maire Ni Ghrada, Mark Redmond, Colleen Shanks, Pamela Schweblin, Davy Spillane, Cillian Vallely, et tant d’autres !

Il existe également en  France. installés en Bretagne. quelques luthiers qui fabriquent cet instrument fantastique : Didier Heuline, Xavier Boderiou. Mallory Pogam. Daniel Gloaguen ( anches, poches. soufflet) et bien sûr, de très nombreux luthiers à l’étranger.

Allez voir et écouter, par exemple :

       “Catherine Ashcroft et Maurice Dickson – Taimse im ‘Chodladh (I am asleep and don’t awaken me – Je m’endors et ne me réveille pas) / King of the pipers”  (uilleann pipe en Ré)

       “Pamela Schweblin  et Carolina Arango – Uilleann pipe et fiddle” (uilleann pipe en Ré)

“Chris McMullan – The Limerick Lament (slow air) Uilleann pipe in B” (uilleann pipe en Si)

       “Mark Redmond  – Lament for Eoghan Ruadh – Uilleann pipe in B” (uilleann pipe en Si)

où vous pourrez apprécier le jeu de régulateurs.

2)  O’ Riada Group Ceoltoiri Chualann

     Ceoltoiri Chualann est un groupe de musique traditionnelle irlandaise fondé en 1960 et dirigé par Sean O’ Riada (1931 – 1971, dont le nom en anglais était John Reidy), groupe dont Paddy Moloney fit partie.

     Ceoltoiri signifie  musiciens en irlandais et Chualann est un quartier de Dublin (Baile Atha Cliath en irlandais) où habitait Sean O’Riada et où le groupe répétait.

     L’idée de Sean O’ Riada a été  d’harmoniser la musique traditionnelle irlandaise (airs de danse, ballades, etc.) et de faire jouer ensemble, en associant le chant, de nombreux instruments tels que: clavecin, piano, violon,  bodhran (percussion), accordéon, flûte traversière irlandaise, uilleann pipe, tin whistle. Cela a été une grande réussite et a conduit à donner un souffle nouveau à la musique traditionnelle.

     Sean O’Riada a également contribué à faire connaître l’oeuvre du harpiste aveugle et merveilleux compositeur qu’était Turlough O’ Carolan (1670 – 1738).

(3) The Chieftains 

  C’est Sean Potts, l’ami de Paddy Moloney avec lequel Paddy fondera “The Chieftains”, qui suggéra le nom du groupe. En 1964 paraît un roman qui rencontrera un grand succès : The Death of a Chieftain (La Mort d’un Chieftain), écrit par un certain John Montague. En Irlande, “Chieftain ” veut dire Chef de clan. L’histoire raconte la disparition d’un chieftain important, ce qui est pour le clan une véritable catastrophe.

   La décision est prise. Les membres du groupe seront tous des “chieftains”. De nombreux musiciens rejoindront le groupe au cours de sa longue existence et en renouvelleront sa composition.

   Les Chieftains, menés de main de maître par leur leader charismatique, leur chieftain en chef, Paddy Moloney, rencontreront d’énormes succès dans le monde entier, en produisant une musique dynamique et vivifiante, mais toujours dans le respect de la tradition irlandaise.

(4) Le bodhran

  Le bodhran : prononcer “baoureume”. C’est un instrument de percussion typiquement irlandais. Le nom vient de l’irlandais (gaélique) “bodhar” qui signifie sourd (bouzar en breton), non pas que l’instrument rende sourds ceux qui l’écoutent (ou celui qui joue…), mais parce qu’il produit un son sourd.

    C’est une sorte de  tambour constitué par une peau (en général une peau de chèvre) tendue sur un cadre circulaire en bois de faible hauteur. Le diamètre varie de 30 à 60 cm. On joue avec un “beater” ou “tipper”, bâtonnet en bois, qui permet de frapper la peau en donnant des sons différents selon l’endroit où l’on tape, la main libre se plaçant à l’arrière contre la peau, ce qui permet, en la faisant glisser, de modifier la tonalité (on peut aussi parfois taper le bord du cadre pour donner un certain effet). On peut également frapper avec la main seule. 

    C’est un instrument qui marque le rythme de la danse (reels, jigs…) et qui doit soutenir l’instrument leader qui mène l’air. Il ne doit pas couvrir le son des autres instruments du groupe.

    Il existe deux types de jeu :

          – le “Kerry style”, où l’on joue avec les deux extrémités arrondies du “beater” ou “tipper”.

          – le “Top end style”, où l’on joue avec un stick en général plus long et plus fin, sur un bodhran de plus petit diamètre, dont la peau est moins tendue et dont le cadre est plus large, ce qui permet d’obtenir d’autres nuances dans le jeu.

    Le bodhran peut aussi se jouer en solo.

    Allez voir sur internet et tapez (liste non exhaustive !) :

         – “The Maguire’s at Temple Bar Tradfest 2017 ” : le joueur de bodhran Sean Maguire n’a que 11 ans et déjà une belle assurance !!! et ses grandes soeurs (concertina, violon), pleines d’admiration pour le frérot, attendent patiemment qu’il ait terminé son solo…qui dure plus de 3 minutes !

         – ” John Joe Kelly Bohdran Solo Christ Church Dublin 2012 ” (un magnifique joueur). Voir aussi “Michael McGoldrick Christ Church Dublin 2012” (bodhran en accompagement).

         – ” Kirsten Allstaff gallowglass Music video” (flûte traversière “irlandaise en Mib, bodhran, bouzouki)

         – ” The Bodhran Buzz – Sean & Emma Maguire ” (magnifique duo)

         – ” The Maguire Band on The Ray D’Arcy Show” (la famille Maguire au complet)

         – ” Bodhran Solo Birr Theater  janvier 2016 “

         – ” Kevin Conneff Bodhran Solo ”  (c’est le chanteur et joueur de bodhran des Chieftains)

         – ” Michelle Stewart Bodhran Solo “

         – ” Irish dance & drum “

    Bonne écoute ! Régalez-vous ! Si après tout ça, vous ne vous mettez pas vous-même au bodhran…