Jil Servat : kaner, aozour ha stourmer /  Gilles Servat : chanteur, compositeur et militant (bilingue)

       

Jil Servat est une véritable icône dans le monde de la musique bretonne. Un sacré militant aussi, qui a toujours défendu, bec et ongles, notre identité, notre culture et notre langue. Un compositeur qui est l’auteur de chants si merveilleux !

 
   



  Ar c’han a zo bet ar pezh en deus kavet evit treuskas deomp e entan evit Breizh. Ha peseurt kaner! Fromet omp atav pa sav e vouezh, ur vouezh ken kreñv, ken don ha ken tomm. Ha nag ur bevañs dibar pa vez eñ war al leurenn ! Ar chañs ’meus bet da welet ha da selaou anezhañ e- keñver Gouel al levr brezhoneg e Karaez (1), e 1990. En eñvor dispar ! 
 
    Jil Servat a zo ganet e 1945 e Tarbes. E dad a oa a orin eus Naoned hag e vamm eus Ar Groazig. E Breizh emaomp  amañ ?(2)
 
    Dizale e teu gant e dud da chom tro-dro da Angers e-lec’h e kej e 1987 gant Serj Bihan, ur paotr eus Enez Groaz hag en deus kizidikaet anezhañ diwar-benn kudennoù politikel ar vro. Eno e tizolo istor an enez ha buhez dibar Yann-Bêr Kalloc’h (3). Lennadur e oberenn brudet :« Ar en deulin » a zo bet un diskuliadur evitañ ! E Enez Groaz, ’barzh un davarn anvet « Chez Poulouzig », e ra anaoudegezh gant Glenmor. Ur gejadenn a-bouez ! Ha diwezhatoc’h e ra anaoudegezh gant ur plac’h eus ar vro, an hini a vo … e wreg !
 
    Mont a ra goude-se da Bariz er bloavezhioù 1970, e Montparnasse, ar c’harter darempredet gant Bretoned divroet. En un davarn anvet « A la ville de Guingamp » e krog da ganañ.  Diwezhatoc’h e vez gwelet anezhañ e « Ti Jos ». Eno en deus skrivet en un tenn« La blanche hermine » (4), ar ganaouenn  anavezet gant an holl  hag he deus deus lakaet anezhañ da vezañ brudet !
 
    Hiziv e lavar e skrivfe pozhioù un tammig disheñvel…. Met pa vez war al leurenn e vez goulennet atav digantañ « La blanche hermine » ! Ur ganaouenn stourm, evel meur ar re all : « L’hirondelle » pe « Yaouankiz va bro », hag all.
           C’est par l’intermédiaire du chant en effet qu’il nous a transmis sa passion pour la Bretagne. Et quel chanteur ! L’émotion nous prend chaque fois que s’élève sa voix, une voix si puissante, si profonde et si chaude. Et quelle présence extraordinaire quand il est sur scène ! J’ai eu la chance de le voir et de l’écouter lors de la Fête du livre breton à Carhaix (1) en 1990. Un grand souvenir !
 
    Jil Servat est né en 1945 à Tarbes. Son père était originaire de Nantes et sa mère du Croisic. Sommes-nous ici en Bretagne ? (2)
 
   Il vient habiter Angers avec ses parents et il y rencontre en 1987 un certain Serj Bihan, un gars de l’Ile de Groix qui le sensibilise sur les problèmes politiques du pays. Il découvre alors l’île et la vie hors du commun de Yann-Bêr Kalloc’h  (3) à travers la lecture de son œuvre célèbre : « Ar en deulin » qui est pour lui une véritable découverte ! C’est à l’Ile de Groix, dans une auberge qui s’appelait « Chez Poulouzig » qu’il fait la connaissance de Glenmor. Une rencontre d’importance ! Il fait plus tard la connaissance d’une fille du pays, celle qui deviendra…sa femme !
 
    Il part ensuite à Paris, dans les années 1970, à Montparnasse, le quartier des Bretons exilés. Il commence à chanter dans une taverne qui s’appelait « A la Ville de Guingamp ». On le retrouve plus tard à « Ti Jos ». C’est là qu’il compose d’une traite « La blanche hermine » (4), la chanson que tout le monde connaît et qui l’a rendu célèbre !
 
   Il dit aujourd’hui qu’il écrirait des paroles un peu différentes… Mais quand il est sur scène, on lui demande toujours « La blanche hermine » ! Un chant de lutte comme tant d’autres : « L’hirondelle » ou « Yaouankiz va bro », etc.
   Kentañ pladenn ’m eus prenet a oa ur bladenn vinyle prenet e Montroulez anvet « Chantez la vie, l’amour et la mort ». Setu aze ur bladenn e-lec’h e lavar tout ar pezh en deus en em c’halon diwar-benn diparti hor yezh hag hor sevenadur ha diwar-benn distruj ar maezhioù, ar c’hleuzioù hag an natur. hag an natur. Hag e lavar ivez amañ e soutenn evit al labourerien gwasket hag e spi evit dieubidigezh hor bro. Selaouit ma karit : ” Madame la colline “. “Gwerz ar mengleuz”, “Arbres”. “Ni a stourmo gant mein”
 .
    Ur gwir barzh eo eñ ivez, leun a gizidigezh.  Selaouit da skouer : « Je dors en Bretagne ce soir », « Retrouver Groix », « Je vous emporte dans mon coeur », « La vie s’écoule, la vie s’enfuit », « La route de Kemper » ha « Le moulin de Guérande »…
 
    Bez a zo ivez gant Jil Servat un den, ur c’haner a lavar e garantez evit Bro-Iwerzhon pa selaouer : « Sur les quais de Dublin » pe « Dirty old town ». Hag evitañ a zo un dra a zo pouezus ivez : adunvaniezh Breizh ! Penaos e c’hellfe al « Liger-Atlantel » bezañ distaget ouzh Breizh, peogwir e oa bet kaozeet brezhoneg eno, n’eus ket pell ahan, e bro Gwenrann ?
 
    Kan a ra an aliesañ e galleg, met disket en deus ar brezhoneg ivez hag hor yezh e komz brav-tre. O stourm evit difenn ar brezhoneg eo bet atav. Lavaret en deus ’barzh ar gazetenn « Bretons » (n°168 -miz Here 2020) en doa gouelet pa ouezas e oa bet krouet ar skol gentañ Diwan.  Evitañ n’eus na yezhoù “bihan””, na yezhoù “broadel”, yezhoù dre-vras nemetken. Met n’eo ket saveteet ar brezhoneg evit-se.  Ret eo stourm…bepred . Ha bez a zo labour c’hoazh war ar stern!
 
  
 
  Le premier disque que j’ai acheté est un disque vinyle acheté à Morlaix et qui s’intitule : « Chantez la vie, l’amour et la mort ». Voilà un album dans lequel il dit tout ce qu’il a sur le coeur à propos de la disparition de notre langue et de notre culture et concernant aussi la destruction de la campagne, des talus et de la nature. Et il apporte aussi ici son soutien aux travailleurs exploités et son espoir pour une Bretagne  libre. Ecoutez donc ” Madame la colline”. “Gwerz ar mengleuz”, “Arbres”. “Ni a stourmo gant mein”.
 
    C’est aussi un vrai poète plein de sensibilité. Ecoutez par exemple : « Je dors en Bretagne ce soir », « Retrouver Groix », « Je vous emporte dans mon coeur », « La vie s’écoule, la vie s’enfuit », « La route de Kemper » et « Le moulin de Guérande » …
 
    Il y a aussi chez Jil Servat un homme, un chanteur  qui dit son amour pour l’Irlande quand on écoute « Sur les quais de Dublin » ou « Dirty old town (5) ». Et il y a aussi pour lui une chose d’importance : la réunification de la Bretagne ! Comment la Loire-Atlantique peut-elle être détachée de la Bretagne quand on sait qu’on parlait breton autrefois à Guérande, il n’y a pas si longtemps que cela ?
 
    Il chante le plus souvent en français, mais il a aussi appris le breton et il parle parfaitement notre langue. Il a toujours défendu le breton. Il a raconté dans le magazine « Bretons » (n° 168 -octobre 2020) qu’il avait pleuré en apprenant la création de la première école Diwan. Il n’y a pour lui ni langues “minoritaires”, ni langues “régionales”,  mais seulement des langues à part entière. Mais le breton n’est pas sauvé pour autant. Il faut lutter…toujours. Et il faut sur le métier encore remettre l’ouvrage !
 

YK – miz Genver 2024 (YK-janvier 2024)

Sources : souvenirs personnels, discographie (dont son dernier CD paru : « A cordes déployées », internet, magazine Bretons (octobre 2020), la très belle biographie « Gilles Servat » écrite par Michel Toutous (éd. Ouest France)

Annexes :

  1. Fête du livre breton à Carhaix : ce festival a lieu chaque année le dernier week-end d’octobre. Organisée par l’association EGIN, une association dont le but est de promouvoir et de diffuser les cultures de Bretagne sous toutes leurs formes, Ce salon attire la majorité des éditeurs bretons. En 2023, le 34ème festival avait comme président d’honneur Alan Stivell et comme invité d’honneur l’Ecosse. 
  • 2 Le Croisic et le Pays guérandais : Situé entre deux rivières commerçantes, la Loire et la Vilaine, le port du Croisic se développe dès le XVI siècle grâce au commerce. Les navires marchands apportent de l’Europe du Nord fer, étain, bois, goudron ou draps et repartent ou poursuivent leurs voyages chargés du précieux sel de Guérande. Le lest de ces caraques, caravelles ou autres gogues quant à lui est utilisé pour la construction puis l’extension de la cité portuaire. Son développement sera aussi assuré par la pêche de la sardine, du hareng ou de la morue.(https://lecroisic.fr/fr/rb/383476/apercu-historique)

 Le breton était la langue vernaculaire jusqu’au XVIIIe siècle chez les “petites gens” de toute la presqu’île guérandaise ! les derniers bretonnants bilingues sont morts vers 1950. A propos de l’usage de la langue bretonne en pays guérandais il convient de se reporter à l’ouvrages suivant Quilgars Henri. La langue bretonne dans le pays de Guérande. In: Annales de Bretagne. Tome 27, numéro 2, 1911. pp. 292-308 (https://www.persee.fr/doc/abpo_0003-391x_1911_num_27_2_1362)

  • 3. Yann-Bêr Kalloc’h : cf article « Me ’zo ganet e-kreiz ar mor » (Je suis né au milieu de la mer) (bilingue)

4. L’hermine, symbole de la Bretagne : L’hermine est un symbole héraldique que l’on trouve sur le drapeau actuel de la Bretagne : onze « hermines » ou plutôt onze queues d’hermine, car ce sont les queues noires de l’animal qui sont stylisées sur le drapeau et non l’animal lui-même dont le corps est blanc ou beige selon les saisons.

D’où vient ce symbole ? Un certain Pierre de Dreux, prince capétien, donc de lignée française, devient duc de Bretagne par son mariage en 1213 avec Alix, petite-fille du duc de Bretagne Conan IV (NB : Alix est également une demi-soeur d’Arthur Ier de Bretagne, lequel fut assassiné à Rouen en 1203, à l’âge de 19 ans, sur ordre de son oncle le roi d’Angleterre Jean “sans Terre”, sans que sa grand-mère Aliénor d’Aquitaine ne dise mot… raison d’État ?). Pierre de Dreux prend le nom de Pierre Ier et apporte à la Bretagne l’hermine, cet emblème qui figurait déjà sur une partie de son blason personnel. L’hermine signifiait la destination initiale de Pierre Ier à une carrière ecclésiastique… Bien que s’étant souvent opposé durant son règne aux pouvoirs de l’Église, qu’il jugeait trop étendus, Pierre conservera ce symbole.

Il faut imaginer les queues noires de l’hermine attachées par des barrettes au milieu des peaux claires de l’animal cousues côte à côte, pouvant ainsi former un manteau, d’où leurs dispositions en quinconce.

Le drapeau breton actuel, le « Gwenn-ha-Du », a été imaginé par Morvan Marchal avec son complice Ronan Klec’h dans les années 1920. Il reprend dans un canton un ensemble de 11 hermines, ce chiffre n’ayant pas de signification particulière et 5 bandes noires symbolisant les pays de haute Bretagne (les pays de Saint-Brieuc, de Dol, de Saint-Malo, de Nantes et de Rennes) et 4 bandes blanches symbolisant les pays de basse Bretagne (à savoir : la Cornouaille, le Léon, le Trégor et le pays Vannetais).  Le premier drapeau breton : une croix noire sur fond blanc (le Kroaz-Du) avait lui été créé lors des croisades.

On raconte que lors de l’hiver 1327, le duc de Bretagne Jean III étant à la chasse dans les environs de Guéméné-Penfao, se trouva face à une blanche hermine qui avait été acculée par des paysans, le dos à un ruisseau boueux. Le duc obtint la grâce du petit animal qui détala sans demander son reste. Après réflexion, le duc se dit : une hermine sait fort bien nager. Elle aurait donc pu s’enfuir en traversant le ruisseau, ce qu’elle ne fit pas. Elle ne voulait pas salir sa blanche fourrure et préférait donc mourir ? C’est de là que viendrait la devise des souverains bretons : « Kentoc’h mervel eget bezañ saotret !» (« Plutôt mourir que de se salir !»)

  • 5. Dirty old town : une chanson écrite en 1949 par le chanteur compositeur écossais, James Henry Miller (1915-1989), plus connu sous son nom d’artiste d’Ewan Mac Coll. A l’origine, mais l’auteur se résoudra sous la pression des critiques à modifier un peu les paroles. cette chanson faisait explicitement référence à la ville de Salford où il vivait. Chantée notamment par les Dubliners puis par les Pogues cette mélodie est aujourd’hui internationalement célèbre.

Chantez la vie, l’amour et la mort : 

Madame la colline : 

Je dors en Bretagne ce soir :

Retrouver Groix :

Je vous emporte dans mon coeur :

La vie s’écoule, la vie s’enfuit :

La route de Quimper :

Le moulin de Guerande :