Histoire d’une sortie en boîte …

                Il ne sera pas question, ici, de la trop fameuse sardine de Marseille qui, en des temps lointains, en boucha paraît-il le port (1). Non, nous allons plutôt dans cet article suivre notre bonne sardine de l’atlantique. Celle qui explique la renommée et l’activité des ports de la côte sud de la Bretagne pendant deux siècles. Il sera alors nécessaire d’évoquer le travail des ouvrières chargées de la mettre en boîte.

         En Bretagne Sud la pêche et la transformation du poisson ne date pas d’hier. Ne retrouve- t-on pas dans la baie de Douarnenez les vestiges de ces grandes fosses où nos sardines se décomposaient lentement au soleil ? (Avant Notre réchauffement climatique ? Tiens, tiens …) afin d’obtenir le précieux garum (2), ce condiment fort apprécié des peuples méditerranéens ? la production de cet « élixir » et de ses sous-produits, tels que la pâte de poisson, ne disparaît pas avec l’effondrement de l’empire romain. On les trouve mentionnés dans des écrits jusqu’au VIIIème siècle. Avec le sel ils figureront longtemps parmi les principaux produits d’échanges commerciaux de la région.

       Nos sardines seront par la suite successivement salées et conditionnées en tonneaux puis sauretées c’est-à-dire fumées comme les harengs puis pressées.  Ce dernier procédé fera notamment la fortune des négociants-armateurs de Douarnenez de la fin du XVIIème jusqu’au milieu du XVIIIème siècle. Le pressage s’effectue un peu partout dans les ports dans de petits ateliers voire chez de simples particuliers, généralement des pêcheurs, qui disposent de leur propre outillage et valorisent ainsi leur pêche. C’est une activité saisonnière dont la rentabilité est très dépendante de l’abondance ou de la rareté de la matière première. De plus, si la sardine se conserve mieux ainsi traitée, il semble que la chair de ce délicat poisson y perde sa structure et … sa saveur ce qui limite le rayonnement de ce produit heureusement peu coûteux.

          Aux environs de 1850, commence la grande époque pour la sardine bretonne : celle des « friteries ». C’est en effet en 1820 que le nantais Joseph Colin (1785-1824) met au point une nouvelle méthode de conservation : une fois frites, les sardines sont délicatement déposées dans des boîtes en fer blanc (3) d’abord soudées à l’étain puis plus tard serties à froid par des machines-outils. Joseph Colin installe sa première usine de conserve en 1824 à Nantes. Vers1850 survient la découverte de pépites d’or en Californie ; La frénétique « ruée vers l’or » qui s’en suit va générer un énorme besoin de vivres facilement transportables. C’est là une opportunité de reconversion qui séduit de grandes fortunes nantaises (4) et les usines vont pousser comme champignons tout le long de la côte sud de la Bretagne de Douarnenez au Croisic. Au début du XXème siècle près de 25 000 ouvrières, bientôt appelées « Penn Sardin » (5) travailleront dans les 150 conserveries du littoral breton alimentées par les 3 860 bateaux de la flotte de pêche sardinière !

          Cette activité saisonnière (6), soumise aux aléas de la pêche (7), concerne tout autant les gens de la côte que la population paysanne de l’arrière-pays. De douze à quatre-vingt printemps on vient à pied, en charrette et plus tard en autobus pour répondre à l’appel «Merc’h d’ar fritur ! » (« Les filles, à la conserverie ! ») (8). Si quelques hommes sont employés au sertissage ou à l’entretien des machines c’est principalement une activité de femmes (et d’enfants (9)) depuis la réception du poisson jusqu’à sa mise en boîte. On se loge comme l’on peut, qui chez la parentèle, qui entassé dans des chambres louées d’année en année ou dans des dortoirs mis à disposition par les patrons.  

            Les conditions de travail sont rudes : Imaginez un travail posté, debout les sabots parfois collés dans la boue car le sol des usines est de terre battue. Selon l’affectation, certes l’environnement de travail peut être différent mais la pénibilité reste partout la même : Ici l’écœurante odeur des viscères et des têtes de poissons qui tombe dans le seau au pied de l’ouvrière, puis là auprès des grands bacs de saumurage, dans lesquels les ouvrières plongent les mains à longueur de journée, l’atmosphère humide saturée de sel, plus loin la chaleur étouffante des marmites remplies d’huile d’arachide ou d’olive chauffées à 150°…. Les emboîteuses sont-elles plus chanceuses ? Dans un brouhaha de chamboule-tout il faut vite finir d’apprêter aux ciseaux chaque sardine et la coucher délicatement à sa place dans sa boîte.  

         Partout, tout au long de la chaîne de fabrication, il faut assurer la cadence. Les contre-maître, d’anciennes ouvrières ayant une parfaite connaissance du métier (et des attentes du patron), y veillent. La sardine est fragile, les quantités débarquées au retour des flottilles de pêches sont souvent importantes et les chambres froides n’existent pas encore. En conséquence les cadences sont éprouvantes … et les horaires élastiques. Un bon arrivage de sardines peut engendrer une journée de 12 ou 15 heures ! jusqu’au début du XXème siècle les patrons ignoreront la loi des huit heures (1919). Seule obligation respecter la règle des 72 heures de travail par semaine. Effectuées de jour comme de nuit. Les heures passées à l’usine dans l’attente du poisson ne sont pas payées. les heurs supplémentaires ne sont pas majorées, pas plus que les heures de travail de nuit (en principe interdit pour les femmes). Au fil du temps, au rythme de l’évolution de la société, sous les coups de buttoirs des mouvements sociaux (10) les conditions de travail et les salaires ne vont cesser de s’améliorer mais dans le même temps l’activité va se déplacer vers le Portugal puis le Maroc et les usines fermer les unes après les autres.

A leur poste ou lors des moments de pause ou d’attente les Penn Sardin chantent.  Devant les longues tables où leurs mains s’activent. Elles chantent pour se donner du courage, oublier la fatigue et garder la cadence. Celle qui chante le mieux, ou simplement celle dont la voix porte le plus loin, entonne une chanson en français ou en breton et les autres ouvrières l’accompagnent ou reprennent en chœur les refrains.

        Du cantique à la chanson gaillarde en passant par la gwerz ou la romance, le répertoire est des plus varié et il faut avoir de la mémoire ! 

        Les cantiques, car si le cœur voit rouge et que des pensées anarchistes ou révolutionnaires ne sont pas pour déplaire, la majorité des Penn Sardin fréquentent l’église et toutes participent aux pardons. Rien d’étonnant donc à entendre s’élever au milieu des tables de travail des cantiques connus de tous comme « O Rouanez karet an Arvor ( https://www.youtube.com/watch?v=l7bfDBWbms8) ou l’air « du Pardon de San Erwan (https://www.youtube.com/watch?v=qgw_HdJPji8)

      Il y a les airs à la mode appris à partir des feuilles volantes achetées au colporteur. Les airs sont souvent faciles à retenir d’autant qu’un même air peut être utilisé pour plusieurs chansons. Les couplets quant à eux relatent souvent un fait divers tragique comme « allazher diouallerien denvet » (https://follenn.kan.bzh/snvacher.mp3)

       Ce sont aussi des gwerz comme « Ar plac’h iferniet » ce chant très ancien qui parle d’un jeune homme qui va rechercher sa fiancée en Enfer (https://www.youtube.com/watch?v=F_3HFgOqa6Q),  « gwerz Penmarc’h »   qui évoque le naufrage de la flotte d’Audierne devant Penmarc’h  ( https://www.youtube.com/watch?v=zKg2GA-hkfQ). 

       Des mélodies plus légères comme « Ma mije bet liou ha paper gwenn » chant d’amour d’une jeune fille enceinte d’un garçon enrôlé pour la guerre ( https://abp.bzh/audio.php?id=55893) ou encore « touri toura » sur le thème de la jeune fille enlevée par des marins et qui se suicide une fois à bord (https://www.youtube.com/watch?v=nMq4Ca6UAB4 ).

       On chante ou plutôt on fredonne des chants séditieux comme « Saluer riches heureux » (https://www.youtube.com/watch?v=Jx7LS7ZK_-s) cette chanson anarchiste écrite et composée par le poète roubaisien Henri Simoens (1841-1907). Mais gare à ne pas être surprise à chanter de tels couplets !    

        Enfin, une fois fini de traiter un arrivage de sardines il faut attendre le retour de la flottille de pêche avec on l’espère de quoi se remettre à l’ouvrage. Si certaines Penn Sardin en profitent pour prendre un peu de repos, d’autres, restées en groupe auprès de l’usine, préfèrent se dégourdir en dansant. Parfois une bombarde, un biniou ou un accordéon mènent la danse mais le plus souvent il suffit là encore de chanter des airs parfois très évocateur comme « Merc’hed ar friturioù » (https://www.facebook.com/bretagne.culturediversite/videos/merched-ar-friturioù/2862924427275688/) ou « Merc’hed douarnenez »( https://raddo-ethnodoc.com/paysdelaloire/document/3242320)

         On ne peut conclure cette évocation de la vie des Penn sardin sans rappeler les chansons composées plus récemment  

        En premier lieu, la très célèbre chanson au nom évocateur « le chant des sardinières »   (https://www.youtube.com/watch?v=50VKs3g6DqQ&list=RD50VKs3g6DqQ&start_radio=1). Cet air à danser qui évoque si bien la lutte de ces ouvrières du siècle dernier n’est pas d’époque mais a été composée, musique et paroles, en 2008 par Claude Michel autrice, compositrice, interprète, concarnoise et engagée décédée en 2023.

      Sans oublier « La révolte des sardinières » (https://www.youtube.com/watch?v=xAGpHSV3uEM

) texte écrit par Jean-luc Rougnant le guitariste du groupe La Bordée sur l’air de « En el pozo Maria Luisa » une chanson populaire des vallées minières d’Asturie. ion toujours aussi agile. 

HG décembre 2025 

Sources garanties sans IA :

« Penn Sardin deux siècles de pêche à la sardine » (François Bertin ed Ouest France 2001)

                  Fascicule exposition « les sardinières » Sené 2025

                  Revues le Chasse-marée

                  Disque : le chant des sardinières Marie-aline Lagadic et Klervi Rivière (2006)

                   Et diverses ressources Internet 

ANNEXES :

  1. La sardine marseillaise : Un fait historique serait à l’origine de cette galéjade. En 1778 le vicomte de Barras, l’officier ayant commandé le régiment français d’infanterie coloniale de Pondichéry, est capturé par les Anglais. Un an plus tard, bénéficiant d’un échange de prisonniers entre la France et l’Angleterre, il vogue en direction de la France à bord d’un navire cartel. En droit international, un navire ayant ce statut, chargé de transporter des communications ou des prisonniers, arbore un pavillon d’identification particulier qui lui confère l’immunité… et la sécurité.

                                    Hélas, notre navire croise la route d’une frégate anglaise peu au fait du bon droit. De fait, une bordée lâchée par erreur écourte brutalement la vie du capitaine et de quelques matelots (oh so sorry monsieur le Français !). Notre cartel reprendra sa route sous les ordres de l’officier en second et arrive en vue de Marseille le 19 mai 1780.

                A la suite d’une erreur de navigation cette fois, le navire porte sur les rochers à l’entrée du Vieux Port et coule dans le chenal. L’accès et la sortie du port de Marseille seront rendu impossibles à la majorité des embarcations jusqu’à son renflouement. 

                Ce bateau avait pour nom … « le Sartine » en l’honneur d’Antoine de Sartine (1729-1801) alors ministre de la Marine de Louis XVI. D’où la plaisanterie qui a traversé le temps. 

2. Garum : Ce condiment épicé, comparable au nuoc-mâm vietnamien ou à l’allec suédois, était très apprécié du légionnaire romain et plus généralement de tous les habitants du bassin méditerranéen. Utilisé à Rome dès la période étrusque et en Grèce, cette « mixture », composée de chair et de viscères de poisson, est mise à fermenter très longtemps (deux à trois mois) dans une saumure très concentrée. Après la macération pendant laquelle se produit une autolyse et une fermentation microbienne, le mélange est filtré. Sa forte teneur en azote et en acide aminés fait de cette sauce un aliment excellent. Mais « Gare au garum ! » aurait pu chanter Brassenus l’ancêtre de qui vous savez. En effet la mixture peut aussi contenir des vers intestinaux tel que le ténia du poisson connu sous le nom de « biothriocéphale » sympathique compagnon pouvant affecter les systèmes digestif et nerveux de l’homme. 

3. Fer-blanc et appertisation : Selon sa définition, « tôle d’acier doux (teneur en carbone inférieure à 0,08%) d’épaisseur inférieure à 0,5 mm et recouverte d’étain sur les deux faces ». Cet alliage s’avérant non toxique il est massivement utilisé pour le conditionnement alimentaire. L’invention du fer-blanc (pas celle de la boîte de conserve !) remonte au XIIIème siècle. Les métallurgistes de Bohème et de Saxe ont réussi longtemps à en garder le secret. Cependant, grâce à Colbert qui fait venir des techniciens allemands, une première manufacture de fer blanc est créée en 1665 à Beaumont-La-Ferrière dans la Nièvre. D’autres implantations suivront en Normandie, en Alsace ou en Franche-Comté mais leur déclin sera rapide face à la concurrence des Anglais et des Gallois. La production de fer-blanc deviendra l’apanage de la Grande-Bretagne qui fournira presque l’intégralité de la demande française jusqu’à la fin du XIXème siècle.

         C’est Nicolas Appert qui a inventé une technique de stérilisation des aliments dans des bouteilles de verre à l’usage de la marine. Raymond Chevalier Appert, poursuit les recherches de son beau-père. Il invente alors l’autoclave qui permet la stérilisation des boîtes évitant ainsi le désagréable risque d’empoisonnement que connurent les premières conserves.

4. Fortunes nantaises : Beaucoup de ces fortunes se sont constituées au XVIIIème siècles autour de la traite négrière. Dès 1807 cependant, le parlement britannique abroge la traite atlantique et le « droit de visite » des navires étrangers que s’arroge en 1815 la Royale Navy, alors maîtresse des mers, perturbe le commerce triangulaire. En France Napoléon abolie à son tour la traite des noirs en 1815 (après avoir rétablie l’esclavage en 1803 alors que celui-ci avait été aboli par un décret du 4 février 1794 !). Abolition de la traite certes, mais pas de l’esclavage qui, lui, ne sera aboli sur tous les territoires français qu’en 1848 sous la seconde république (décret du 27 avril 1848). 

5. Penn sardin (tête de sardine en français) : cette appellation étendue à toutes les ouvrières des conserveries de poisson était le nom donné aux femmes de Douarnenez depuis au moins le XVIIIème siècle. Ces femmes, qui bien souvent travaillaient le poisson pêché par les hommes, arboraient la coiffe locale à savoir un petit bonnet de dentelle posé sur au moins deux autres bonnets de tissus l’un enserrant la chevelure en arrière du front et l’autre toujours noir chargé de mettre en valeur la broderie blanche. Cette coiffe, éventuellement agrémentée de rubans que l’on escamote à l’usine pour des raisons évidentes de sécurité et de propreté, est aussi portée dans un certain nombre de paroisses environnantes. De profil, avec beaucoup d’imagination la tête des femmes ainsi coiffées fait penser à une tête de sardine.

6. Une activité saisonnière : Pour ce qui concerne la sardine qui approvisionne les friteries bretonnes, la période de pêche dure de sept à huit mois d’avril à novembre. D’avril à mai on pèche la sardine de dérive peu appréciée des usiniers car trop grasse et surtout trop grosse pour être mise en boîte. Aux derniers jours de juin apparaît la jeune sardine par banc entier. Commence alors, le 21 juin ou le 27 juin selon les régions, la campagne de la sardine de rogue.

Mais la sardine est volage et certaines années, sans que l’on sache vraiment pourquoi, elle semble bouder nos côtes. En principes les périodes de surabondance alternent avec de courtes périodes de raréfaction et l’on s’en accommode. Si la pénurie se prolonge c’est alors fermeture d’usines et grande misère. Ce sera le cas de 1880 à 1887 puis en 1902 et 1903.

7. La sardine dite « de rogue » : Si la pêche de la sardine attire moins l’attention que la pêche à la morue sur les bancs de Terre-Neuve ou d’Islande et moins encore que la chasse à la baleine, elle restera jusqu’au milieu du XXème siècle une activité éprouvante non dépourvue de risque. Début juin La saison commence. On charge sur les chaloupes sardinières les filets et les barils de rogue, ce coûteux appât très « odorant » à base d’œufs de morue saumurés venu du Danemark. Armées par quatre ou cinq hommes elles partent alors sous voile à la recherche d’un banc de sardines. Celui-ci une fois localisé, il faut faire remonter les sardines à la surface en les appâtant. En cas de succès Il convient alors de choisir le bon filet c’est-à-dire celui dont la taille de la maille permettra de retenir le poisson, si fragile, juste derrière les ouïes. Il faut ensuite déployer les quarante ou cinquante mètres de filet droit (La senne tournante qui permet de ne plus appâter ne sera autorisée qu’en 1940 car jugée trop prédatrice), Cette opération s’effectue à la rame et la chaloupe a souvent été démâtée pour faciliter la tâche des rameurs (Les paysans costauds que l’on a recruté à cet effet). Pendant ce temps le patron de pêche continu à distribuer de la rogue juste là où il faut pour forcer la vorace sardine à traverser le filet, bleu comme la mer. Si quelques thons voraces n’ont pas dispersé le banc de sardines, si aucun marsouin joueur n’est venu le déchirer, si le poids des poissons captif ne l’a pas fait couler, il est temps de remonter à bord le filet, à la force des bras, et de démailler délicatement mais prestement les précieuses sardines. Les mâts remis en place, c’est enfin le retour au port qui prend des allures de régate car le premier arrivé aura les meilleures offres pour sa pêche alors que les derniers ne sont pas sûr de vendre leurs paniers.

8.  « Merc’h d’ar fritur ! » : c’est ce que criaient, dans les ruelles du centre- ville de Douarnenez, de nuit comme de jour, les contre-maîtres, en majorité des femmes, pour rappeler à l’usine les filles de leurs équipes dès que le retour de la flottille de pêche était signalé.

9. Travail des enfants : le travail des enfants est interdit avant 12 ans mais les patrons ne voient pas d’inconvénients à ce que des enfants plus jeunes aident leur mère ou leur sœur. L’important c’est que la sardine finisse en boîte de jour ou … de nuit selon la quantité. Seule condition donc : disparaître au passage du patron ou des contre-maîtres. 

10. Les grandes grèves : 1902, 1909 : les premiers grands mouvements sociaux ont lieu avec l’installation progressives des sertisseuses mécaniques (en 1905 la nouvelle machine Gautier est capable de traiter 400 boîtes à l’heure là où un ouvrier qualifié ne peut en sertir plus de 70). C’est un coup mortel porté à la caste des soudeurs-boîtiers si redoutée des patrons d’usine. Révoltes et bris de machines n’arrêteront pas le progrès et la disparition rapide de cette corporation. La bretagne a aussi ses canuts ! 

1905 : Un vaste mouvement de grèves émerge à Douarnenez, mené par une employée, une certaine Eulalie Belbéoch (1850-1926). Elle revendique un paiement à l’heure. Commencé en janvier, le conflit se prolonge jusqu’au 23 août sans résultat.

         1924 : Le 21 novembre les ouvrières de l’usine Carnot, à Douarnenez, déclenchent un mouvement de grève pour réclamer une rémunération de 25 sous de l’heure en remplacement du paiement au rendement (en 1890 il faut environ 6 heures de travail à une ouvrière sans spécialisation pour s’offrir … une boîte de sardine !). Le mécontentement fait rapidement …tache d’huile dans les autres friteries. Le mouvement est soutenu par les pêcheurs et la municipalité de la ville. En effet le maire, Daniel Le Flanchec, premier maire élu communiste de France, fait voter par le conseil municipal des distributions de repas gratuits et même l’achat de sabots pour les grévistes qui défilent en ville. La grève ne prendra fin que le 5 janvier 1925, quelques jours après qu’il eut été établi que l’attentat dont a été victime Daniel Le Flanchec a bien été commandité par deux industriels membres du syndicat des usiniers. Les Penn Sardin auront donc gain de cause mais le maire de Douarnenez, un brillant orateur qui sera réélu en 1925, y aura perdu une voix. la sienne à la suite du coup de couteau reçu à la gorge.